JO : Feu vert pour les taxis-volants
À l’occasion des JO 2024 de Paris, un arrêté vient d’être publié au Journal Officiel qui autorise l’exploitation de taxis volants pendant les Jeux Olympiques. Feu vert du gouvernement pour une opération qui se veut un tournant pour l’avenir de l’aviation et de la mobilité urbaine tout en faisant face à une contestation qui considère ce type de transport comme de la science-fiction.
Le cadre de l’expérimentation est cependant réduit puisque seuls les eVTOL (drones à décollage et atterrissage verticaux) de la marque Volocopter sont autorisés, avec une hélistation unique: le « Vertiport », une plateforme flottante de 760 m2, sur la Seine, au niveau de Paris-Austerlitz. L’autorisation prévoit une exploitation commerciale jusqu’au 31 décembre 2024, avec des vols prévus entre 8 heures et 17 heures, à raison de deux mouvements par heure, soit 900 vols sur l’ensemble de l’expérimentation.
Le drone Volocopter a fait l’objet de tests pendant une année à partir de l’aérodrome de Pontoise, situé à une soixantaine de kilomètres de Paris. Une fois en phase d’exploitation, il assurera le transport de passagers sur trois lignes : entre les aéroports de Roissy-Charles de Gaulle et du Bourget, ainsi que celui entre les vertiports d’Austerlitz et de Paris-Orly. Il desservira également d’autres destinations en couronne de Paris, avec une liaison vertiport – héliport d’Issy-les-Moulineaux et une liaison Issy-les-Moulineaux – aérodrome de Saint-Cyr-l’École. Enfin, deux boucles, une au Bourget et l’autre à l’héliport d’Issy-les-Moulineaux, sont prévues pour des baptêmes de l’air.
À l’initiative de ce projet de taxis volants qui vient enfin de recevoir le feu vert du gouvernement à quelques jours de la cérémonie d’ouverture des JO et après de multiples rebondissements, on trouve la présidente d’Île-de-France, Valérie Pécresse. Une présidente qui aime les drones puisqu’elle avait ouvert la voie au financement régional de l’équipement des polices municipales en drones, avec à la clé une enveloppe de 300 000 euros. L’objectif est de surveiller les jeunes « pour alerter en cas de regroupement suspects ».
La région a consacré plus d’un million d’euros à ce projet, auquel est associé le gestionnaire des aéroports parisiens, le groupe ADP, et Volocopter, une start-up allemande en difficulté financière.
« On ne reviendra pas à la bougie », martelait Valérie Pécresse face aux écologistes et à l’opposition lors d’une assemblée du conseil régional. Il faut dire que le projet a du plomb dans l’aile :
Le Volocopter ne peut transporter qu’un seul passager, en plus de son pilote. Si celui-ci est un peu plus silencieux (75 dB) qu’un hélicoptère avec ses 18 rotors en couronne au-dessus du cockpit, il est gourmand en électricité avec une consommation estimée à 10 fois celle d’une voiture électrique et 30 fois celle d’un métro ! Son rayon d’action est réduit à 35 kilomètres et sa vitesse de pointe de 100 km/h le place loin derrière la majorité des aéronefs. Quant à la facture, chaque itinéraire est estimé à 110 euros, soit un peu plus du double de celui d’un trajet en taxi.
En septembre 2023, l’Autorité environnementale a rendu un avis défavorable au projet dans son étude à la demande d’ADP, critiquant les circuits et une étude d’impact jugée « incomplète » s’agissant du vertiport. Le commissaire enquêteur a déclaré lors de l’enquête publique menée les mois suivants que cette expérimentation « ne présente pas d’intérêt a priori si elle est centrée sur des vols commerciaux correspondant à un mode de transport qui, dans les transports franciliens, ne peut offrir d’alternative aux modes actuels ni participer à une décongestion du trafic ». Le Conseil de Paris s’est opposé à cette expérimentation en déclarant qu’elle « n’a pas d’utilité, qu’elle est anti-écologiste et qu’elle n’est réservée qu’à des personnes fortunées ». Enfin, la pétition du collectif « Taxis-Volants non merci » vient de recueillir plus de 15 500 signatures.
Si ce projet vitrine sera surtout destiné à transporter quelques passagers de jets privés, il ne pourra toutefois pas prendre la forme d’une exploitation commerciale pendant les JO. L’initiative devra se contenter de vols offerts à titre gratuit, l’appareil n’ayant pas obtenu la certification de l’Agence européenne de sécurité aérienne (EASA). Une première qui prive les investisseurs de revenus.
Pour sa défense, l’entreprise est une première mondiale, une initiative résolument tournée vers l’avenir du transport urbain. Dans un secteur à fort impact carbone, c’est un premier pas. Loin de rivaliser avec un métro, 45 fois moins polluant à trajet équivalent, cette expérience pose les jalons d’un transport aérien économique et plus respectueux du climat. Dans toute nouvelle approche, il faut du temps et les premières expériences ne se font pas sans accroc, comme nous le rappelle le souvenir des premiers aéronefs.
Sources : FranceInfo, Libération, Volocopter